Les comptes consolidés des groupes français non côtés peuvent être établis selon deux référentiels : CRC 99-02 ou IFRS 3 (2008) sur option. Pour un même prix d’acquisition des titres de participation d’une entité cible et une situation nette comptable à l’acquisition donnée, l’identification et l’évaluation des actifs acquis et des passifs transférés dépendent des hypothèses opérationnelles et actuarielles retenues mais aussi des référentiels utilisés.

Or, l’allocation du coût d’acquisition d’une entité e de nombreuses conséquences sur la situation patrimoniale et financière consolidée du groupe, sur les résultats de l’entité regroupée, présents et futurs : selon le référentiel utilisé, les conséquences seront différentes.

Les points commun

Méthode de l’acquisition

Quel que soit la référentiel utilisé, c’est la méthode dite « de l’acquisition » qui s’applique :  l’application de la méthode dite « dérogatoire » (regroupement de la cible à la valeur nette comptable « VNC ») ayant été strictement restreint dans le référentiel français (CRCC § 215) et étant interdite en IFRS. Les deux référentiels imposent l’identification de l’évaluation des actifs acquis et passifs repris, y compris ceux qui ne sont pas identifiés dans les états financiers de l’entité acquise (ex : marque créée en interne ; fonds de commerce ; contrat avantageux ; engagements de retraite…). Mais dans les deux cas, tous les éléments identifiés ne peuvent être comptabilisés au bilan de l’entité regroupée (ex : capital humain).

Critères de comptabilisation des actifs et passifs

Dans les deux référentiels il y a le souci de l’identification et d’évaluation des actifs et passifs existants à la date d’entrée de la cible dans le périmètre de consolidation – sans que les événements ultérieurs puissent être pris en considération – et en y incluant la profit à l’avancement ou le contrat avantageux (ex : contrat de location simple, en CRC) acqui au vendeur à la date d’acquisition : ainsi le résultat post acquisition ne sera que celui de l’acquéreur.

Impôt différés

Dans les deux référentiels, les impôts différés doivent être pris en compte (IDA et IDP sur les réévaluations (sauf sur le GW et incorporels indissociables en CRC) ; sans actualisation.

Passifs éventuels – complément de prix

Dans les deux référentiels, les passifs éventuels sont pris en compte (CRC 21122 ; IFRS 3 § 23), toutefois, CRC 21222 fait référence à la possibilité de comptabiliser un passif conformément à l’article 312-1-1 du PCG alors que l’article 312-5 précise qu’un passif éventuel n’est pas comptabilisé au bilan ; IFRS 3 § 23, quant à lui, précise que « Les dispositions de IAS 37 ne s’appliquent pas pour déterminer les passifs éventuels à comptabiliser à la date d’acquisition. Par contre, l’acquéreur doit comptabiliser à la date d’acquisition un passif éventuel repris à l’occasion d’un regroupement d’entreprises s’il s’agit d’une obligation actuelle découlant d’événements passés et si sa juste valeur peut être évaluée de manière fiable. Aussi, contrairement à IAS 37, l’acquéreur comptabilise un passif éventuel repris à l’occasion d’un regroupement d’entreprises à la date d’acquisition même s’il n’est pas probable qu’une sortie de ressources représentatives d’avantages économiques soit nécessaire pour éteindre l’obligation » ; de même que la probabilité de payer un complément de prix qu’il convient d’évaluer (CRC § 2110 ; IFRS 3 § 45).

Actualisation

Dans les deux référentiels, les prêts, créances et dettes sont actualisés si nécessaire (CRC § 2122 ; IFRS 3 ne fait pas référence à l’actualisation mais à la juste valeur des actifs et passifs identifiables § 18).

Ecart d’acquisition

Dans les deux référentiels, l’écart d’acquisition a un caractère résiduel (différence entre le coût d’acquisition et la situation nette réévaluée nette d’impôts différés) ; mais son contenu et son évolution dans le temps sont radicalement différents ; l’un et l’autre sont adossés à des business plan différents : celui de l’acquéreur et de son projet en CRC ; celui des hypothèses du marché en IFRS.

Délai d’affectation

Dans les deux référentiels il y a un délai d’affectation à l’intérieur duquel l’identification et l’évaluation des actifs et passifs peuvent être modifiées en contrepartie du GW ; mais les modalités des ajustements et leurs impacts sont sensiblement différents (CRC § 2110 ; IFRS 3 § 45).

Les différences

Sources de différences

En normes françaises le CRC 99-02 a fait l’objet de nombreuses modifications de convergence (règlement 2000-07 ; 2002-12 ; 2004-03 ; 2005-10) vers le référentiel IFRS.

Mais le processus de convergence s’est arrêté, d’une part car des dispositions très importantes du 2005-10 n’ont pas été homologuées (possibilité de ne pas amortir le GW) ; d’autre part, du fait de la révision d’IAS 22 remplacée par la norme IFRS 3 (2004) puis IFRS 3 Révisée (2008) – menée en collaboration avec le FASB – qui introduit de nouvelles divergences.

Dès lors, outre que l’approche de l’acquisition est totalement différente, de nombreuses modalités divergentes de comptabilisation existent entre les deux référentiels, rendant la comptabilisation d’une même acquisition peu comparable.

Toutefois il faut rappeler que CRC 99-02 sera modifié avant 2015, du fait de la nouvelle directive européenne. Mais des différences significatives avec les IFRS resteront inévitablement.

Philosophie différente des comptes consolidés

Dans le référentiel CRC, la situation consolidée privilégie la position de l’actionnaire majoritaire ; les actionnaires minoritaires sont présentés comme des tiers. Dans ce référentiel on privilégie l’évaluation de la quote-part acquise (goodwill partiel).

Dans le référentiel IFRS, c’est la vision de l’entité économique globale qui prévaut avec deux catégories d’actionnaires : le majoritaire et le minoritaire ; le principe de valorisation est fondé sur la valeur globale de l’entité acquise, d’où la méthode du GW complet ; cependant, dans un souci de consensus entre membres du Board ayant des vues différentes, l’IASB a laissé le choix entre l’une ou l’autre approche (GW partiel ou complet) et cela à chaque opération du regroupement, ce qui ne facilite pas la lecture des comptes,
même au sein d’un même groupe.

Approche différente de la comptabilisation du regroupement

Selon Gilbert Gélard (ancien membre du Board de l’IASB) « …IFRS 3R n’est pas un processus d’allocation du prix d’achat (PPA) ; c’est un inventaire de tous les actifs acquis et passifs repris, mesurés à leur juste valeur. Avec les trois niveaux : marché actif / comparables / coûts-revenus. A ce stade on ne se préoccupe pas du prix payé. Dans une deuxième étape, on se préoccupe du prix pour calculer par différence le goodwill résiduel. On utilise le prix payé pour appliquer la méthode du goodwill partiel et on utilise le prix qu’on aurait dû payer en plus si on avait acquis 100 % si on choisit la méthode du goodwill
complet… l’angle d’attaque du problème est très différent du CRC 99-02 ».

Ainsi, l’objectif d’IFRS 3R – contrairement à CRC99-02 – est bien d’identifier et d’évaluer à leur valeur de marché (cf. ci-après critères de comptabilisation) un maximum d’actifs et passifs, reconnus ou non chez la cible, tel que le feraient les acteurs du marché ; selon la méthode du goodwill complet, l’écart d’acquisition n’est calculé qu’une seule fois sur la base de la valeur de 100 % de la cible à la date de la prise de contrôle ; même principe pour le goodwill partiel qui n’est comptabilisé qu’une seule fois à la date de prise de contrôle. Les variations ultérieures du pourcentage d’intérêt laisseront le GW inchangé et impacteront les capitaux propres.

Au contraire, le CR C 99-02 (§ 220) s’intéresse principalement aux coûts d’acquisition des quotes-parts acquises successivement par le groupe – les intérêts minoritaires étant considérés comme des tiers – et va chercher à déterminer le goodwill de chaque acquisition, en coût historique ; l’écart d’acquisition global sera la somme des GW des lots. Les ajustements de valeur des actifs et passifs – dans le délai d’affectation, et pour certains d’entre eux même postérieurement au délai – viendront impacter le goodwill, comme les variations de pourcentage d’intérêts ultérieurs.

Selon IFRS 3R et fort logiquement les coûts d’acquisition de l’acquéreur sont considérés comme des opérations avec des tiers extérieurs au regroupement ; en outre elles ne valorisent pas la cible acquise, ce qui justifie qu’on les comptabilise en charges. En CRC 99-02 – qui s’intéresse au coût d’acquisition “complet“ de la quote-part acquise y compris les frais (droits, honoraires) – ces montants viendront mécaniquement augmenter l’écart
d’acquisition (CRC-210).

La norme IFRS-PME

Cette norme, contrairement à IFRS-3R, définit précisément ce qu’est le coût d’un regroupement et elle y inclut tous les coûts directement attribuables qui sont donc inclus dans le GW comme en CRC.

Critères de comptabilisation des actifs acquis et passifs repris

  • Le critère de fiabilité

Les deux référentiels ont pour objectif d’identifier et d’évaluer les actifs acquis et les passifs repris ; mais alors que CRC 99-02 exige – normalement – la séparabilité et une fiabilité suffisante, (CRC § 2111), IFRS 3R – selon IAS 38 visant le cas des regroupements d’entreprise (IAS 38 § 23) – contrairement aux acquisitions séparées, considère que dans cette situation, le critère de fiabilité dans l’évaluation est présumé satisfait. L’objectif est donc clairement de sortir un maximum d’actifs – et le cas échéant de les amortir – du goodwill, qui lui n’est pas amortissable, mais soumis au test de dépréciation. Au contraire, CRC 99-02 (§ 21130) exige l’amortissement du goodwill et donc des incorporels, non évalués spécifiquement, qui y sont le cas échéant inclus pour
fiabilité insuffisante ou dans un souci de simplification.

  • Les business plan et les intentions de l’acquéreur

Le référentiel IFRS mesure la juste valeur des actifs et passifs, selon les critères des acteurs du marché. La valeur est donc indépendante des intentions de l’acquéreur et des synergies prises en comptes par lui, sauf si elles seraient reconnues par le marché ; le business plan qui étaye les évaluations est celui de la cible “en l’état“, donc avec les seuls investissements de maintenance : les synergies propres à l’acquéreur sont dès lors incluses dans le goodwill.

Au contraire le référentiel CRC 99-02 qui recherche la valeur pour l’acquéreur, distingue les biens d’exploitation de la cible (les biens hors exploitation sont en valeur de marché) qui sont donc évalués en valeur d’utilité, compte tenu de l’usage que compte en faire l’acquéreur (CRC-21121) dans le contexte des synergies et investissements de croissance prévus au business plan de l’acquéreur. Donc un même incorporel, par exemple une marque, pourra être évaluée dans un contexte de chiffre d’affaires supérieur ; une marque abandonnée par l’acquéreur (si reconnue par le marché donc identifiée en IFRS) sera donc incluse dans le goodwill en CRC 99-02.

Ainsi, les hypothèses opérationnelles retenues pour valoriser les actifs risquent-elles d’être très différentes selon le référentiel utilisé.

  • Les parts de marchés

Dans le référentiel IFRS, les “parts de marché“ ne sont pas “séparables“ donc elles ne sont pas évaluées en tant que telle : seules les relations clients sont évalué Dans le référentiel CRC 99-02 – dans la mesure où l’option de non amortissement des écarts d’acquisition n’est pas effective (l’article 6 du CRC 2005-10 qui les mettait dans le goodwill n’a pas été homologué) – les “parts de marchés“ continuent d’être un actif incorporel spécifique comptabilisé au bilan comme tel (CRC 21122).

  • Recherche et développement en cours

Elle est activable obligatoirement en IFRS (IFRS 3 § 34) et sous conditions en CRCC (§ 212).

  • Le capital humain 

Il n’est reconnu en tant que tel dans aucun des deux référentiels et est donc inclus dans le goodwill, qu’il contribue ainsi à justifier.

  • Les passifs éventuels

Alors qu’ils ne sont pas comptabilisés au passif des comptes individuels, ils le sont obligatoirement dans les deux référentiels mais pour un même passif éventuel, les évaluations risquent d’être différentes :

• oui (à 100 %) ou non (à 100 %) en CRC 99-02 ;
• scenarios probabilisés en IFRS (IFRS 3 § 23).

  • Le complément de prix (au-delà du délai d’affectation)

Si l’acquéreur pense qu’il est probable qu’il versera un complément de prix, celui-ci sera actualisé le cas échéant et intégré au coût d’acquisition ; donc dans le goodwill ; mais les modalités de valorisation seront différentes :

• en CRC 99-02, le complément sera à 100 % ou ne sera pas ;
• en IFRS, le complément de prix sera évalué avec un coefficient de probabilité.

Par ailleurs, une autre source de divergence surgit :

• en IFRS, au-delà du délai d’affectation très court de 12 mois, les écarts par rapport au montant probabilisé impacteront le résultat. L’impact sera d’ailleurs contre intuitif : une amélioration de la filiale entrainera un complément de prix consécutif qui sera en charge dans le résultat (IFRS 3 § 50) ;
• en CRC 99-02, même au-delà du délai d’affectation, les écarts entre le prix payé et le montant estimé au passif impacteront le goodwill et non le résultat (CRC 21523).

  • Délai d’affectation et au-delà

Le délai – à l’intérieur duquel les ajustements de l’allocation du prix ont pour contrepartie le goodwill – est différent dans chaque référentiel :

• en IFRS, c’est 12 mois après l’acquisition ;
• en CRC c’est la clôture du deuxième exercice qui suit celui de l’acquisition ; donc le délai sera plus long : entre 12 et 24 mois.

Par ailleurs, en CRC, tout ajustement aura systématiquement pour contrepartie le goodwill.

En IFRS, l’ajustement du goodwill ne sera accepté que s’il s’agit d’informations nouvelles précisant une situation antérieure à l’acquisition. S’il s’agit d’éléments nouveaux,
postérieurs à l’acquisition, l’impact portera sur le résultat.

Cependant, au-delà du délai, une autre particularité existe (“anti-abus“) dans le CRC 99-02 : les ajustements sont en résultat mais s’il s’agit de provision pour risque et/ou provision pour restructuration : la reprise, pour la partie “sans objet“, nécessite en CRC 99-02 un amortissement exceptionnel à due concurrence, du goodwill initial pour ne pas générer d’impact en résultat.

En IFRS, une provision reprise “sans objet“ impacte le résultat positivement.

Acquisitions par étapes (lots successifs) – mouvements ultérieurs

  • En CRC 99-02

Les écarts d’acquisitions dégagés sur chaque lot sont comptabilisés et maintenus à leur valeur historique (soumis à amortissement/dépréciation) et leur somme constitue l’écart d’acquisition global de la cible (CRC § 230).

Ils font l’objet d’amortissement selon les hypothèses retenues par l’acquéreur : si un changement défavorable survient, il y aura un amortissement exceptionnel ; si c’est un changement favorable, le plan d’amortissement sera revu.

Les résultats dégagés depuis l’acquisition d’un lot et/ou les réévaluations (nettes d’impôt différé) des actifs du 1er lot lors de l’acquisition d’un 2e lot sont portées en réserves consolidées (CRC-221). Elles pourraient venir “mécaniquement“ minorer le nouvel écart d’acquisition dans la mesure où la situation nette acquise sera augmentée (résultat depuis le 1er lot et réévaluation nouvelle) face à des coûts d’acquisition de titres qui sont maintenus à leur valeur historique.

Les nouveaux écarts positifs ou négatifs dégagés lors des acquisitions/cessions ultérieures sont affectés au goodwill antérieur (CRC-230).

  • En IFRS 3R

La conception du goodwill est totalement opposé à celle du CRC 99-02 : on ne l’évalue et on ne le comptabilise qu’une seule fois (et non pas par lots) à la date de prise de contrôle (IFRS 3 § 42) :

• Les acquisitions antérieures sont réévaluées à la juste valeur de l’acquisition, avec impact en résultat ; en pratique les participations antérieures sont réputées cédées à cette valeur, puis réacquises en totalité avec dégagement de plus-value ; celle-ci vient mécaniquement augmenter le goodwill d’autant.
• Les acquisitions/cessions ultérieures sont réputées être des opérations entre actionnaires. La valeur du goodwill, mesurée lors de la prise de contrôle est figée.

Les plus ou moins-values dégagées ultérieurement lors des mouvements avec les minoritaires impactent les capitaux propres du groupe.

Pertes de contrôle

  • En IFRS (IFRS 10 § 25 ou IAS 27 (2008) § 33), si une société mère perd le contrôle d’une filiale :

• elle sort de l’état consolidé de la situation financière les actifs et les passifs de l’ancienne filiale ;
• elle comptabilise la participation conservée dans l’ancienne filiale, le cas échéant, à sa juste valeur à la date de la perte du contrôle, et comptabilise par la suite la participation ainsi que tout montant dû par l’ancienne filiale ou à celle-ci selon les normes IFRS qui s’appliquent. Cette juste valeur doit être considérée comme étant la juste valeur lors de la comptabilisation initiale d’un actif financier selon IFRS 9 (IAS 39), ou bien, le cas échéant, comme étant le coût, lors de la comptabilisation initiale, d’une participation dans une entreprise associée ou une coentreprise ;
• elle comptabilise le profit ou la perte associé à la perte du contrôle, qui est attribuable à la participation qui donnait le contrôle.

  • En CRC (dans le cas d’une cession partielle, entreprise déconsolidée CRC 23112  – le CRC analyse également le cas de la cession totale (CRC 2310), de la cession partielle, l’entreprise restant consolidée par intégration globale (CRC 23110) et de la cession partielle, l’entreprise restant consolidée, mais par mise en équivalence (CRC 23111) :

• la prise en compte du résultat de cession s’effectue de la même manière qu’au § 23110 (Dans le cas d’une cession partielle de titres d’une entreprise restant consolidée par intégration globale, l’ensemble des éléments concourant à la détermination de la plus ou moins-value (y compris une quote-part de l’écart d’acquisition et de l’écart de conversion) est pris en compte au prorata de la cession réalisée pour déterminer le résultat de cession) ;
• les actifs et passifs cessent d’être intégrés aux dates et selon les modalités définies au § 2310 (la sortie du périmètre de consolidation de l’entreprise cédée s’effectue à la date du transfert de contrôle à l’entreprise acquéreuse ;
• la valeur comptable de la participation conservée, y compris l’écart d’acquisition résiduel à cette date, est dès lors considérée comme son coût d’entrée.

Les écarts d’acquisition (CRC 99-02) – le GW IFRS 3R

  • Les écarts d’acquisitions CRC 99-02

Dans le référentiel CRC 99-02, ils sont définis comme la différence entre un coût d’acquisition (y compris frais d’acquisition) et une quote-part de situation nette réévaluée à la date d’acquisition. Les acquisitions antérieures et postérieures – selon CRC-210 et 230 – viendront modifier l’écart d’acquisition comptabilisé à chaque fois au coût historique. Seule la méthode du goodwill partiel – pour le groupe – est admise. Les ajustements dans le délai d’affectation, et dans certains cas postérieurs au délai, modifient les écarts d’acquisitions antérieurs.

Les écarts d’acquisitions sont amortis selon les hypothèses d’acquisition. Ils ont véritablement un caractère “résiduel“ sur le plan économique et comptable (CRC § 21130).

  • Le GW IFRS 3R

Dans ce référentiel, le goodwill – même s’il est aussi mesuré par différence entre un prix d’acquisition payé (sans charges d’acquisition) et des actifs acquis et passifs repris – constitue au contraire un véritable actif incorporel qu’il est interdit d’amortir, comme l’illustre bien la méthode du goodwill complet qui est à la base la méthode privilégiée (option pour le goodwill partiel).

Cela est confirmé par sa durée de vie a priori indéfinie, son non-amortissement, et sa soumission au test “d’impairment“ (IAS 36) dans les “UGT goodwill – unités génératrices de trésorerie comprenant du goodwill » (IAS 36 § 80).

La norme IAS 36 insiste pour son suivi dans les UGT et la non compensation des goodwill des différents UGT ainsi que la méthodologie très précise du suivi ultérieur de sa valeur, par exemple en cas de cession d’UGT ou de restructuration.

Compte tenu de l’inventaire et de l’évaluation de tous les actifs acquis et passifs repris qui est réalisé lors de son unique comptabilisation, le contenu du goodwill en IFRS n’est pas équivoque : ce sont les synergies liées aux intentions de l’acquéreur, les parts de marché, les relations clients non contractuels et non séparables, les nouveaux clients, le capital humain. En théorie, son montant doit être validé par l’existence d’un “ebit résiduel“ qui, capitalisé après rémunération du capital investi dans tous les autres actifs “en amont“ (excess earning) permet d’en justifier le montant.

L’amortissement du GW en IFRS-PME

Comme en CRC, seule la méthode du GW partiel est autorisée ; de même son amortissement est obligatoire sur la durée d’utilité des avantages économiques anticipés et selon le rythme de leur consommation. En cas d’indétermination la durée présumée est 10 ans et l’amortissement linéaire.

Les écarts d’acquisition négatifs

  • en CRC 99-02, selon la logique adoptée, il faut d’abord réexaminer les actifs et passifs alloués. Les incorporels dont la valeur ne ressort pas d’un “marché actif“ sont éliminés ; s’il subsiste un écart négatif, il est le cas échéant comptabilisé en provision pour charges dont la reprise est étalée selon les hypothèses retenues (CRC § 21131) ;
  • en IFRS 3R, les allocations sont revues ; s’il subsiste un écart créditeur, il est constaté en totalité en résultat (IFRS 3 § 34).

Suivi de la valeur du GW dans le temps

  • CRC et IFRS-PME

Le GW n’est soumis au test de valeur qu’en cas d’indices de perte de valeur.

  • IFRS 3R

La contrepartie du non amortissement est la soumission – comme tout incorporel à ; durée de vie indéterminée – à un test de valeur (impairment) systématique annuel, selon IAS-36

GW des titres mis en équivalence

Dans le règlement 99-02, lorsque des titres sont évalués dans les comptes consolidés selon la méthode de mise en équivalence (cas des entreprises sous influence notable) l’écart d’acquisition qui résulte de l’opération est présenté selon les mêmes modalités que les écarts d’acquisition définis dans le cadre de l’intégration globale (CRC § 291 al. 1).

Comptabilisation des entreprises sous contrôle conjoint

Dans le CRC (§ 110) les entreprises sous contrôle conjoint (coentreprises) sont consolidées proportionnellement alors qu’en IFRS (IFRS 11 § 24), ils doivent être évalués selon la méthode de mise en équivalence conformément à IAS 28 “Participations dans des entreprises associéeset coentreprises“.

Ventes de puts sur achats d’intérêts minoritaires

Des divergences importantes existent là encore entre CRC et IFRS 3R.

  • IFRS 3R

Selon IAS 32-23, il existe un passif financier représentant la meilleure estimation du montant de trésorerie auquel les minoritaires peuvent prétendre ; une dette actualisée doit donc être comptabilisée. Depuis IFRS 3R, la différence entre la dette comptabilisée et la valeur comptable des I’intérêts Minoritaires s’impute sur les Capitaux Propres (avec IFRS 3 le GW était possible).

Ensuite les variations de valeur (Draft IFRIC mai 2012) passeraient en charge, comme la désactualisation.

  • CRC

Les puts ne sont pas comptabilisés ; ils le sont “au fil de l’eau“, lorsqu’ils sont payés et la différence du prix de rachat avec les intérêts minoritaires comptabilisés va en GW (et non pas en Capitaux Propres comme en IFRS 3R).

Impacts de l’option full GW (IFRS 3R) ou GW partiel (CRC/IFRS PME)

Le choix de l’option est important pour l’impact du rachat des Minoritaires sur le montant des Capitaux Propres et le “gearing“. En effet dans les référentiels CRC et IFRS-PME, l’option Full GW – qui majore, le GW et les Intérêts Minoritaires (en juste valeur) – n’existe pas ; donc en cas de prix plus important, il peut y avoir un impact significatif sur les Capitaux Propres et le ratio d’endettement.

De même, en cas d’acquisition par lots, la méthode d’IFRS 3R qui réévalue l’acquisition antérieure au prix de la prise de contrôle, avec dégagement d’un résultat sur le lot précédemment acquis, majore d’autant les Capitaux Propres ; alors qu’en CRC et IFRS PME le premier lot gardera sa valeur historique sans réévaluation.

Conclusions

Comme cela est souligné par Gilbert Gélard, les approches et la comptabilisation des regroupements d’entreprises en normes françaises CRC 99-02 et en normes IFRS sont très éloignées conceptuellement et comptablement.

Même si les écarts d’acquisition sont calculés par différence dans les deux référentiels, le
référentiel français confère à l’écart d’acquisition un caractère économique et comptable résiduel qui se traduit logiquement par son amortissement sur une durée courte.

Au contraire, pour le référentiel IFRS, le goodwill est un véritable actif incorporel à durée de vie indéterminée dont la valeur est testée annuellement selon la procédure d’IAS 36 avec les “UGT goodwill“ ; son contenu et les hypothèses opérationnelles et actuarielles qui étayent sa valeur doivent être identifiées clairement et justifiées dans le temps.

En dehors du choix pour le “goodwill complet“ les modalités de détermination du goodwill le rendent “mécaniquement“ plus élevé que les écarts d’acquisition, dans le cadre d’acquisition par étape.

Par ailleurs certains ajustements dans le délai d’affectation, voire ultérieurement, pourront impacter les écarts d’acquisition “à la baisse“ dans le référentiel CRC. Dans le référentiel IFRS, du fait de l’intangibilité du montant du goodwill, le risque de sous évaluer les intérêts minoritaires à acquérir lors d’acquisitions ultérieures (impact négatif sur les capitaux propres) peut conduire à l’accroissement de leur évaluation ; de même pour une acquisition avec complément de prix.

On observe ainsi que la quasi intangibilité du goodwill risque d’entrainer a contrario une forte volatilité postérieure des capitaux propres et des résultats futurs si les estimations n’ont pas été bonnes ; auquel s’ajoute le risque d’un “impairment“ comparé à un amortissement régulier dans le cas du référentiel français et à un minimum d’impact sur les résultats.

Ainsi on peut affirmer que non seulement le processus de convergence a cessé avec les dispositions non homologuées 2005-10 du CRC 99-02 mais qu’en outre, le passage d’ IAS 22 à IFRS 3R a introduit de nouvelles divergences conceptuelles et comptables qui éloignent beaucoup la comptabilisation des regroupements d’entreprises entre les deux référentiels. C’est là une des illustrations les plus importantes des fortes différences entre
les IFRS et les normes françaises.